EPINE CALCANEENNE, FASCIITE ET TRAITEMENT PAR LES SEMELLES

DEFINITION

En préambule, il convient de comprendre que les termes, qui vont être utilisés, regroupent bien souvent la même chose, c’est-à-dire des douleurs d’étirement plantaire de tous les éléments qui viennent s’insérer à la partie postérieure du calcanéum (os du talon).

Il peut cependant être fait une distinction selon le stade inflammatoire. A savoir : la fasciite plantaire (ou aponévrosite plantaire) concerne davantage le fascia dans sa partie médiane, alors que l’enthésopathie calcanéenne (ou myoaponévrosite ou tendinoaponévrosite plantaire) trouve son origine au niveau de son insertion à la partie postérieure du calcanéum. Le langage courant parle notamment d’épine calcanéenne.

Le processus pathogène s’explique par la mise en tension excessive de l’aponévrose plantaire (membrane fibreuse située entre le talon et l’avant-pied) qui va créer des micro traumatismes au niveau de son insertion infra-calcanéenne, une inflammation va alors se créer avec la formation de cellules osseuses qui vont conduire à une excroissance en forme d’épine, cette dernière pouvant être diagnostiquée à la radiographie.

La douleur est très vive, décrite par les patients comme une sensation de déchirure au talon qui au fil du temps peut irradier sous le pied et en arrière de la jambe.

A noter que les enthésopathies calcanéennes sont généralement d’origine mécanique (quelque fois inflammatoire dans un contexte de spondylarthrite ankylosante, par exemple).


CAUSES

Le mécanisme de cette pathologie, c’est l’étirement de l’aponévrose.

Sachant que la capacité d’extensibilité maximale d’une aponévrose n’est que de 2 %, contrairement aux tendons (10 %) et aux fibres musculaires (20 %), il est facile d’imaginer que la première structure fibreuse qui va souffrir lors du déroulé du pied au sol, c’est l’aponévrose.

L’étirement de l’aponévrose est favorisé par les troubles statiques tels qu’un pied valgus (arrière-pied et/ou médio-pied et/ou un avant-pied valgus). 90 % des inflammations de l’aponévrose se retrouvent ainsi sur des pieds « plats ». Les 10 % restant concernent des pieds creux.

Cette distinction entre les différents morphotypes de pieds revêt son importance, puisqu’un pied valgus est plutôt considéré comme un pied mou qui va générer un excès de poussée valgisante lors de la phase plantigrade. L’écartement entre le talon et l’avant-pied étant à son maximum, l’aponévrose est enflammée.

Un pied creux est un pied contracturé, l’inflammation sera plutôt localisée sur les tendons.

Par conséquent, l’aponévrosite sera plutôt sur un pied valgus, alors que la myoaponévrosite sera plutôt sur un pied creux contracturé.

L’hypo extensibilité d’Achille et la rétraction du Triceps Sural (muscles du mollet) vont participer à l’étirement aponévrotique. On parle alors de système tricipito suro achilléen plantaire rétracté. En combinaison des troubles statiques, la mise en tension de l’aponévrose sera majorée.

Le mode de chaussage est également un facteur favorisant.


TRAITEMENT PAR LES SEMELLES

Il existe plusieurs façons de traiter une fasciite plantaire ou une épine calcanéenne.

Cette pathologie étant d’origine mécanique, la première façon de traiter qui doit venir à l’esprit est un traitement mécanique par des semelles orthopédiques adaptées.

L’aponévrose plantaire ayant perdu son rôle de stabilisation du pied et du maintien de l’arche interne, la semelle va alors suppléer à cette déficience par l’intermédiaire d’un soutien de l’arche interne et d’une compensation talonnière.

Le soutien de l’arche interne n’a pas la même fonction selon le morphotype de pieds. Dans un pied valgus, ce soutien va agir comme un frein de la poussée valgisante, alors que dans un pied creux, il va agir comme une répartition de charges en augmentant la surface d’appui.

La compensation talonnière doit améliorer la stabilité du talon. La préférence ira sur une sorte de bi-composant avec un matériau dur pour avoir un effet anti valgisation et un matériau mou pour obtenir un effet antalgique.

A noter que les talonnettes molles en silicone gel, qui sont vendues en pharmacies, sont contre productives, car elles vont augmenter l’instabilité et le travail de l’aponévrose qui sont responsables de l’aponévrosite.

Le podologue doit alors apprécier les corrections nécessaires à réaliser au niveau de la semelle pour que le patient soit le plus vite soulagé.

Le rôle du podologue ne s’arrête pas à la simple confection de semelles. Il doit informer le patient en lui donnant des conseils de chaussage, puisqu’il sait très bien qu’avec les semelles, il est dépendant des chaussures. Au même titre que les talonnettes molles, des chaussures sans maintien vont créer de l’instabilité, et de surcroît entretenir l’inflammation.

Il existe d’autres aides thérapeutiques pour traiter une fasciite plantaire (physiothérapie, anti-inflammatoires, infiltrations…) qui vont varier selon le stade de l’inflammation. C’est pourquoi il peut paraître plus judicieux de parler de complémentarité dans les traitements, car le traitement « miracle » n’existe pas (la durée de guérison peut prendre plusieurs mois).

Néanmoins, un traitement par semelles adaptées en premier recours présente l’avantage de répondre à la problématique mécanique de la pathologie et d’être non invasif.

Christophe Lecourt

Podologue chez CAP-PODOTHERAPIE (Lancy et Onex GMO)